Il la regardait du coin de l'oeil. Il ne disait rien. Mais ses yeux devaient tout retranscrire. Il la regardait fumer sa cigarette, elle prenait son temps, à prendre chaque inspiration et à dégager la fumée de sa bouche. Son regard à elle était fixé sur l'écran de la télé. Par gêne. Il le savait. Et ça l'énervait. Parce que quand il lui parlait, surtout de trucs aussi intimes, il aimait bien qu'on le regarde et lui réponde dans les yeux.
- Réponds moi, dit-il d'une voix calme.
Elle tourna sa tête vers lui. Et il croisa enfin ses yeux noirs. Il esquissa un sourire.
- Quoi ? Tu veux quoi ? Sois plus explicite, s'impatienta t-elle.
Il soupira. Elle le forçait dans ses retranchements. Elle était douée pour ça. C'était une vraie joueuse. C'était vraiment compliqué avec cette fille. Pourtant elle est nettement plus jeune. Il n'avait jamais ramé auparavant avec quiconque. Du moins, pas aussi longtemps. Il commençait à dépérir et à se demander si au final il n'était pas un peu pris pour un coup. Mais il se ressaisit et choisit de la prendre à son jeu. Elle veut du cash, elle aura du cash.
- Je me demandais si...
- Bon sans, le coupa t-elle, mais va droit au but.
Elle commenca à se mouvoir et à s'avancer vers lui.
- C'est ça que tu veux ? demanda t-elle en tendant ses lèvres vers lui.
Il n'eut même pas le temps de fermer les yeux que ses lèvres étaient déjà repartie. Elle se rassit à sa place initiale.

Merde, il n'avait rien vu venir. C'était allé si vite qu'il n'avait même pas eu le temps de quoi que ce soit.
- Non mais non, c'est pas comme ça que c'est supposé se faire. s'offusqua t-il.
- Bah tu voulais qu'on s'embrasse non ? s'esclaffa t-elle.
- Je voudrais t'embrasser différemment, dit-il posément sans laisser sa voix trembler, pourtant il sentait que ses mains tremblait. Son coeur battait un peu plus rapidement, et il sentait également son entrejambe se durcir légèrement ce qui le génait encore plus si jamais son interlocutrice venait à s'en apercevoir.
- Tu m'embrasserais comment alors ? demanda t-elle en posant sa cigarette sur le cendrier placé sur la table basse.
- Tu me laisses faire ? demanda t-il en commençant à s'avancer vers elle. 
- On s'embrasse qu'une fois hein, c'est juste pour répondre à ta question. dit-elle rapidement en le voyant, lui et ses yeux amoureux s'approcher d'elle.
Il passa ses mèches brunes derrière son oreille avant d'approcher ses lèvres contre les siennes.
Il était au paradis.
Pour elle c'était l'enfer.

Mais quelle idée stupide de répondre à des demandes de baiser. Et voila, résultat, elle se trouvait aplatie, lui contre elle, à l'embrasser fermement. Elle le soupçonnait pendant ses 30 secondes qui parurent une éternité à vouloir ouvrir sa bouche pour y glisser sa langue. Mais non, elle ne laisserait rien passer. Un baiser seulement, ni langue, ni aucun sexe n'entrera en elle. Pas ce soir. Alors elle sentit son souffle sur elle. Elle avait beau fermer les yeux, essayer d'apprécier, parce qu'elle l'appréciait ce garçon et sa compagnie. Mais non.
Le néant.

Elle sentait qu'il était amoureux. Il se dégagea d'elle et lui murmura des mots totalement amoureux, qu'elle avait du mal à comprendre. Il la fixa et lui dit "Je dois te regarder pour ne jamais oublier ce moment dans ma vie". Alors ils se fixèrent, et elle ne dit un mot. Elle ne faisait pas la maligne. Oserais t-elle lui dire que pour elle ce moment était juste le plus malaisant de sa vie ?
Non.

Il la dévora du regard. Elle avait l'impression d'être son soleil, son astre, sa divinité. C'était trop. Trop pour être vrai. Ses yeux brillaient quand il la regardait. Elle aussi elle avait des yeux humides, mais c'était loin d'être de la joie qui se dégageait de son regard.
Alors, il pris sa main, à elle, et la dirigea vers sa poitrine à lui. Et elle sentit un coeur qui battait fort. Un coeur qui battait fort pour elle.

 

Elle qui ne ressentait rien. Pas pire qu'une pierre, qu'un roc. Ce baiser n'avait été qu'un grand vide aride dans lequel elle s'était plongé. Sans plaisir, sans rien, elle fixait cet homme dont elle ne méritait aucun de ses regards. Elle n'était même plus capable d'apprécier les baisers animés d'un être humain.
Sècheresse, vide, solitude étaient les seuls mots qui l'inspiraient ce soit là.

Sous la neige, en rentrant chez elle. Elle ralluma une cigarette. Les rues étaient vides, elle n'avait jamais sentie une aussi grande solitude qu'à ce moment précis. Elle aurait aimé donner. Alors, elle versa une larme.